Des stéréotypes qui cristallisent les représentations des acteurs
Les représentations sur la manière "d'accompagner les innovations"
D'une manière générale, si les acteurs de terrain interrogés, et notamment les encadreurs pédagogiques, indiquent qu'il est toujours pertinent de valoriser les pratiques innovantes des enseignants, en même temps, deux éléments semblent structurer leurs représentations:
Une tendance à la dévalorisation dans le cas où les pratiques en question ne figurent pas dans les normes et guides de l’enseignant.
Ici, la réaction typique observée chez une partie des encadreurs est une focalisation sur le fait que ces pratiques étaient mentionnées ou non dans le guide de l’enseignant, et le cas échéant, la nécessité d’une sanction du moins verbale.
Des acteurs rencontrés ont dit :
« Pour moi, toute observation qui est hors de la méthodologie décrite dans le guide de l’enseignant est considérée comme une erreur et doit être suivie d’une remarque »
« J’ai observé des répétitions et réitérations en classe. Tout ça est permis dans le guide de l’enseignant. Donc, les enseignants doivent appliquer la méthodologie telle qu’elle est décrite dans leurs guides. »
Une appréciation positive qui ne va plus loin que des encouragements
D’autres encadreurs toutefois tendaient davantage à apprécier positivement les pratiques en question, tout en informant que leur accompagnement consistait surtout à « encourager » ces initiatives, bien que cela soit toujours sans suite.
Des acteurs rencontrés ont dit :
« Nous ne donnons rien à l’enseignant qui met en œuvre ces initiatives si ce n’est que des encouragements verbaux. Si non il fallait qu’il y ait échange d’expérience à travers les réseaux »
En réalité, une petite minorité d’agents indiquent que le problème vient surtout d’un « manque de repères » des agents des services déconcentrés et centraux pour accompagner ces innovations.
Des acteurs rencontrés ont dit :
« La première condition pour piloter ces initiatives de mémorisation et de métacognition est de les connaitre d’abord pour ensuite les vulgariser à travers tous les réseaux scolaires. »
« Non, nous n’avons pas d’outils d’accompagnement, nous ne nous contentons que de l’encouragement de ces initiatives. »
« Les encadreurs de proximité ont des confusions sur le pilotage du fait qu’il n’existe pas de méthodologie décrivant la mise en œuvre de ces initiatives »
Il est aussi possible d’ajouter que ces réactions typiques ont plus globalement été constatés pour toutes les formes d’innovations pédagogiques identifiées et qui ont été partagées aux agents de l’encadrement, ce qui pose la question de la manière de renforcer la capacité des autorités à appréhender et piloter ces innovations.
Les représentations sur la manière "d'accompagner les innovations"
De nombreuses interventions ont posé la question du développement et de la pérennisation de ces innovations. Certaines interventions se sont concentrées sur un impératif d’apport d’intrants (matériels et formation des acteurs).
« L'apprentissage par le jeu est une méthode très efficace. Pour réussir, il faut que les matériels didactiques soient disponibles. Une formation serait toujours nécessaire à l'endroit des Enseignants pour évoluer. »
D’autres interventions ont posé la question de l’adaptation de ces innovations à certaines réalités des classes.
« L'apprentissage par le jeu est une méthode efficace et qui accroche les enfants, comment faire lorsque les classes sont surchargées ? Si l'environnement n'est pas propice ? »
La question de la contextualisation des solutions innovantes le plus souvent importées a également émergé. Ici, tout semble se passer aussi comme si l’innovation vient toujours d’ailleurs.
« Ce courant développé d'abord en Europe a-t-il été adapté aux méthodes et cultures de nos pays ? Les enseignants se permettent-ils de s'inspirer de ces méthodes pour les adapter à leur contexte quotidien et à leurs élèves ? »
Si une pratique fonctionne dans un contexte, ce n’est pas pour autant qu’elle fonctionnera dans un contexte différent, ce qui implique une réflexion sur les conditions nécessaires pour sa mise en œuvre. C’est ici que se pose l’enjeu sur la façon dont le système appréhende et s’approprie ces innovations. L’hypothèse du programme est qu’il est nécessaire de définir les conditions pour une mise en œuvre réussie de ces innovations pour penser la question de leur « mise à l’échelle ».